Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol4.djvu/394

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par les rayons pâles, droits de la lune. Une branche courbée, comme enveloppée de mousse blanche, était éclairée de côté. Les feuilles argentées murmuraient de temps en temps. À la maison les feux étaient éteints, tous les sons s’étaient tus. Seul le rossignol semblait remplir l’espace silencieux et clair. « Dieu ! quelle nuit ! quelle merveilleuse nuit ! » pensa le comte en respirant la fraîcheur parfumée du jardin. « On a regret de quelque chose, on se sent mécontent de soi et des autres, de toute sa vie. Et une fille charmante, exquise… Peut-être est-elle vraiment fâchée… » Là ses rêves s’embrouillaient, il se voyait dans ce jardin avec la demoiselle de province, dans les attitudes les plus étranges, ensuite son aimable Mina se trouvait être à la place de la demoiselle. « Quel imbécile je suis ! Il fallait tout simplement la prendre par la taille et l’embrasser. » Et sur ce regret le comte retourna dans sa chambre.

Le cornette ne dormait pas encore.

Il se retourna aussitôt sur son lit, le visage vers le comte.

— Tu ne dors pas ? demanda le comte.

— Non.

— Veux-tu que je te raconte ce qui s’est passé ?

— Eh bien ?

— Non, il vaut mieux ne pas raconter… Bien, je raconterai. Pousse tes jambes.

Et le comte, renonçant déjà à l’intrigue manquée,