Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol5.djvu/129

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— C’est ça, — fit-il en souriant avec satisfaction. — J’ai tout de suite remarqué dans ses manières quelque chose de particulièrement aristocratique. J’aime les aristocrates. Dans l’aristocratie il y a quelque chose de beau et d’élégant. Et cet officier qui danse si bien ? — demanda-t-il. — Il m’a plu beaucoup aussi, il paraît si gai, si noble. — C’est l’aide de camp N. N.

— Lequel ? — demanda Delessov.

— Celui qui m’a heurté quand nous dansions. Ce doit être un brave homme.

— Non, c’est un vaurien, — répondit Delessov.

— Ah non ! — intervint avec chaleur Albert. — En lui il y a quelque chose de bien, très agréable. Et il est bon musicien, — ajouta-t-il ; — il a joué là-bas un morceau d’opéra. Depuis longtemps personne ne m’a tant plu.

— Oui, il joue bien mais je n’aime pas son jeu, — dit Delessov qui voulait amener son interlocuteur à causer musique. — Il ne comprend pas la musique classique ; Donizetti et Bellini, ce n’est donc pas de la musique. Vous êtes probablement de cet avis ?

— Oh ! non, non, excusez-moi, — se mit à dire Albert avec une expression déférente. — La vieille musique est de la musique, et la nouvelle musique c’en est une autre. Dans la nouvelle musique il y a aussi des beautés extraordinaires : « La Somnam-