Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol5.djvu/313

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À la soirée, j’étais assise avec des dames, quand le grand-duc s’approcha de moi, de sorte que je dus me lever pour causer avec lui. En me levant, involontairement, je rencontrai les yeux de mon mari, et je vis comment, à l’autre bout de la salle, il me regarda et se détourna. Je me sentis subitement si honteuse et si peinée que je devins confuse, maladroite, et que mon visage et mon cou se couvrirent de rougeur sous le regard du grand-duc. Mais je devais rester debout et écouter ce qu’il disait en me regardant de haut. Notre conversation ne fut pas longue, il n’avait pas de place pour s’asseoir près de moi et il sentit sans doute que j’étais gênée avec lui. La conversation roulait sur le bal passé, sur mes projets d’été, etc.

En s’éloignant de moi, il exprima le désir de faire connaissance avec mon mari, et je le vis s’approcher de lui ; ils causèrent ensemble à l’extrémité de la salle. Le grand-duc disait sans doute quelque chose de moi, car, au milieu de la conversation il regarda en souriant de notre côté.

Mon mari, tout à coup, rougit, salua bas, et, le premier, s’éloigna du grand-duc. Je rougis aussi. J’avais honte de l’idée que le grand-duc devait se faire de moi, et surtout de mon mari. Il me semblait que tous avaient remarqué ma timidité gauche, pendant que je causais au grand-duc, et l’acte étrange de mon mari.

Dieu sait comment on pouvait interpréter cela :