Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol6.djvu/299

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mit ses gants, s’enveloppa bien, plongea son menton dans sa haute cravate et dit presqu’à haute voix : « Bon ! » C’est ce qu’il se disait furtivement quand il se sentait bien.

Durant la nuit il avait neigé, et quand Ivan Petrovitch se dirigeait vers l’église, elle n’était pas encore fondue, mais ramollie. Maintenant bien que le soleil n’eût pas encore paru, toute la neige était déjà absorbée par l’humidité et sur la grand’route, où il fallait parcourir trois verstes jusqu’au tournant de Tchirakovo, la neige blanchissait seulement l’herbe de l’année passée ; sur le chemin vicinal les chevaux marchaient dans la boue collante. Mais les bons et gros chevaux de son haras, bien nourris, tiraient très facilement la voiture et elle paraissait rouler d’elle-même en laissant une trace noire sur la boue. Ivan Petrovitch s’abandonnait à des pensées agréables. Il pensait à sa maison, à sa femme, à sa fille, « Macha, joyeuse m’attendra sur le perron, elle verra en moi tant de sainteté ! Une fille étrange, charmante, seulement elle prend déjà les choses trop à cœur, et mon rôle d’homme important qui doit tout savoir, me devient déjà pénible et ridicule. Si elle savait que je la crains ? » pensait-il, « et Catherine (sa femme) sera probablement de bonne humeur aujourd’hui. Elle sera exprès de bonne humeur et la journée sera bonne. Ce ne sera pas comme la semaine dernière, à cause des paysannes de