Page:Tolstoï - Anna Karénine, 1910, tome 1.djvu/456

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pleines de tarte, et la confiture mêlée aux larmes leur barbouilla toute la figure.

« Tania, ta robe neuve ; Grisha… » disait la mère souriant d’un air attendri, tout en cherchant à préserver de taches les habits neufs.

Les belles toilettes ôtées, on mit des robes ordinaires aux filles et de vieilles vestes aux garçons, on fit atteler le char à bancs, et l’on alla chercher des champignons au bois. Au milieu des cris de joie, les enfants remplirent une grande corbeille de champignons. Lili elle-même en trouva un. Autrefois, il fallait que miss Hull les lui cherchât ; ce jour-là, elle le découvrit toute seule, et ce fut un enthousiasme général. « Lili a trouvé un champignon ! »

La journée se termina par un bain à la rivière ; les chevaux furent attachés aux arbres, et le cocher Terenti, les laissant chasser les mouches de leurs queues, s’étendit sous les bouleaux, alluma sa pipe, et s’amusa des rires et des cris joyeux qui partaient de la cabine.

Daria Alexandrovna aimait à baigner elle-même les enfants, quoique ce ne fût pas chose facile de les empêcher de faire des sottises, ni de se retrouver dans la collection de bas, de souliers, de petits pantalons qu’il fallait, le bain fini, reboutonner et rattacher. Ces jolis corps d’enfants qu’elle plongeait dans l’eau, les yeux brillants de ces têtes de chérubins, ces exclamations à la fois effrayées et rieuses, au premier plongeon, ces petits membres qu’il fallait ensuite réintroduire dans leurs vêtements, tout l’amusait.