Page:Tolstoï - Hadji Mourad et autres contes.djvu/64

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Et le général fâché se soumit au rire charmant de la belle. Un sourire parut sous sa moustache.

— Je reconnais que j’ai eu tort, dit Vorontzoff, mais…

— Eh bien, moi aussi, je me suis emporté, dit Meller, et il tendit la main au prince.

La paix était faite, et l’on décida de laisser momentanément Hadji Mourad chez Meller et ensuite de l’envoyer au chef du flanc gauche.

Hadji Mourad était assis dans la pièce voisine, et bien que ne comprenant pas ce qu’on disait, il se rendit compte cependant de ce qu’il lui importait de comprendre, à savoir qu’ils avaient discuté à son sujet, que son éloignement de Schamyl était une chose très importante pour les Russes, et que par conséquent, non seulement on ne le déporterait ni ne le tuerait, mais qu’il pourrait exiger d’eux beaucoup. Il comprit en outre que, nominalement le chef, Meller Zakomelski n’avait cependant pas l’importance de Vorontzoff, son subordonné ; que Vorontzoff était important, et non Meller Zakomelski. C’est pourquoi, quand celui-ci le fit appeler et l’interrogea, Hadji Mourad se tint devant lui avec beaucoup de fierté et de solennité, et déclara qu’il était sorti de la montagne pour servir le tzar blanc, mais qu’il ne rendrait de comptes qu’à son sardar, c’est-à-dire au commandant en chef à Tiflis, le prince Vorontzoff.