Page:Tolstoï - Hadji Mourad et autres contes.djvu/88

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— Akhmet Khan et Schamyl furent tous deux mes ennemis, continua-t-il, en s’adressant à l’interprète : — Dis au prince qu’Akhmet Khan est mort sans que j’aie pu me venger de lui ; mais que Schamyl est encore vivant, et que je ne mourrai pas sans me venger, dit-il en fronçant les sourcils et serrant fortement les mâchoires.

— Oui, oui, fit tranquillement Vorontzoff. — Comment donc veut-il se venger de Schamyl ? demanda-t-il à l’interprète. — Mais dis-lui qu’il peut s’asseoir.

De nouveau Hadji Mourad refusa de s’asseoir, et à la question qui lui était transmise il répondit, qu’il était venu chez les Russes précisément pour leur aider à anéantir Schamyl.

— Bon, bon, dit Vorontzoff. — Mais que veut-il faire exactement ? Mais qu’il s’asseoie !

Hadji Mourad s’assit, et dit que si on l’envoyait à la ligne de Lezguine et lui donnait une armée, il se portait garant qu’il soulèverait tout le Daghestan et que Schamyl ne pourrait plus résister.

— C’est bon. C’est faisable. J’y réfléchirai. L’interprète traduisit ces paroles de Vorontzoff.

Hadji Mourad devint pensif.

— Dis au Sardar, reprit-il, que ma famille est entre les mains de mon ennemi, et que tant qu’elle sera dans la montagne je suis lié et ne peux servir. Si je marche contre lui, il tuera ma femme, ma mère, mes enfants. Que le prince sauve ma famille, qu’il l’échange contre des prisonniers, et alors je mourrai ou j’écraserai Schamyl.