Page:Tolstoï - La Famine, 1893.djvu/272

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en arrivent. Aussitôt je prends cet homme pour un mendiant de profession, et le dépit me prend contre lui, surtout parce qu’il débauche des enfants.

— Et que demandes-tu ? — Vois ce que tu peux. — Mais que puis-je voir ? Nous ne pouvons rien faire ici, il faut voir sur place.

Mais il se soucie peu de ce que je lui dis et de nouveau recommence les litanies tant de fois entendues et qui ne me paraissent pas sincères : « La terre n’a rien donné ; j’ai une famille de huit personnes ; je suis seul à travailler ; ma vieille est morte. Nous avons mangé la vache pendant l’été. À Noël, le dernier cheval est tombé. Quant à moi, passe encore ! ce sont les enfants qui ont faim ; voilà trois jours qu’ils n’ont pas mangé. »