Page:Tolstoï - La Sonate à Kreutzer trad Pavlovsky.djvu/233

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Je respirais à peine et je ne pouvais retenir ma mâchoire de trembler. Donc, c’était ce que je pensais ! Jadis, il m’arrivait, en rentrant chez moi, de penser qu’un malheur m’attendait, mais je me trompais, et tout allait comme auparavant. Mais maintenant cela n’allait pas comme auparavant. Tout ce que je m’imaginais, tout ce que je croyais être des chimères, tout cela existait en réalité. Le voilà !

Je faillis sangloter, mais tout de suite le démon me souffla : « Pleure, fais des sentimentalités, et eux se sépareront tranquillement et il n’y aura pas de preuves, et toute la vie tu douteras, tu souffriras. » Et la pitié pour moi-même s’évanouit et il ne demeura que le besoin bestial d’une action adroite, rusée et énergique. Je devins une bête, une bête intelligente.

— « Non, non, dis-je à Gregor, qui voulait aller m’annoncer. Fais ceci, prends une voiture et va vite prendre mes bagages. Voilà le billet. Va. »

Il alla le long du corridor pour prendre