Aller au contenu

Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/305

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Dans la mairie du canton se trouvaient la troupe, un régiment de sergents avec leurs revolvers pendant à leurs cordons rouges, les principaux parmi les paysans de l’endroit et enfin les coupables. Autour de tout cela s’était groupée une foule de plus de mille individus.

Le gouverneur arrivé en calèche descendit, prononça le discours d’usage et demanda les coupables et un banc. Cette demande ne fut pas d’abord comprise, mais un sergent que le gouverneur traînait partout à sa suite et qui s’occupait spécialement de l’organisation de ces exécutions, répétées plusieurs fois dans ce gouvernement, expliqua que le banc demandé devait servir à flageller.

Ce banc fut apporté, ainsi que les verges, et on appela les bourreaux. Les bourreaux sont préparés d’avance, on les choisit parmi les voleurs de chevaux du même village, car les soldats refusent absolument ce genre de fonctions.

Quand tout fut prêt, le gouverneur ordonna de faire sortir des rangs le premier entre les douze hommes signalés par le propriétaire comme les plus coupables. C’était un père de famille honorable, estimé de tous, un homme de 40 ans qui défendait énergiquement les intérêts de sa classe et qui était pour cela très considéré par les habitants. On l’amena près du banc, on le déshabilla et on l’étendit.

Le paysan essaya de supplier, mais, voyant que cela était inutile, il fit un large signe de croix et se coucha. Deux sergents se précipitèrent pour le maintenir. Le savant docteur se tenait à portée pour le cas où ses secours et sa haute science médicale deviendraient nécessaires. Les bourreaux crachèrent dans leurs mains, levèrent les verges et commencèrent à frapper. Il se trouva que le banc n’était pas assez large et qu’il était