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Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/369

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rible où il se trouve et qui empire de plus en plus soit réelle, et veut se réveiller pour revenir à la vie véritable.

Et de même qu’il suffit à l’homme endormi de faire un effort d’esprit et de se demander : « Est-ce que je ne rêve pas ? » pour que la situation qui lui semblait si désespérée s’évanouisse instantanément et qu’il se réveille dans la réalité tranquille et heureuse ; de même l’homme de notre temps n’a qu’à faire un effort d’esprit, qu’à mettre en doute ce que sa propre hypocrisie et l’hypocrisie générale lui présentent comme la réalité, et se demander : « Est-ce que ce n’est pas une illusion ? » pour se sentir aussitôt, comme l’homme endormi, transporté du monde imaginaire et effrayant, dans la réalité véritable, tranquille et heureuse.

Et pour cela l’homme n’a pas besoin d’actions d’éclat, ni d’héroïsme, il n’a besoin simplement que d’un effort moral.

Mais l’homme peut-il faire cet effort ?

D’après la théorie actuelle, nécessaire à l’hypocrisie l’homme n’est pas libre et ne peut pas changer sa vie.

« L’homme ne peut pas changer sa vie parce qu’il n’est pas libre, et il n’est pas libre parce que tous ses actes sont la conséquence de causes anciennes. Et quoi que l’homme fasse, ses actes ont toujours une cause à laquelle il obéit. Et c’est pourquoi l’homme n’est pas libre de modifier sa façon de vivre, » disent les défenseurs de la métaphysique de l’hypocrisie. Et ils auraient absolument raison si l’homme était un être inconscient, incapable, après avoir reconnu la vérité, de s’élever à un degré moral supérieur. Mais l’homme, au contraire, est un être conscient et qui s’élève, malgré tout, de plus en plus vers la vérité. Donc, si même il n’est pas libre dans ses actes, les causes mêmes de ses actes qui con-