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Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/393

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CHAPITRE VIII
ACCEPTATION INÉVITABLE PAR LES HOMMES DE NOTRE MONDE DE LA DOCTRINE DE LA NON-RÉSISTANCE AU MAL
La doctrine du Christ n’est pas un recueil de lois, mais une nouvelle conception de la vie, c’est pourquoi elle n’est pas obligatoire et n’est pas acceptée par tous dans toute sa portée ; quelques-uns seulement l’ont admise dans sa véritable signification. — Le christianisme est de plus une prophétie de la disparition de la vie païenne et, par suite, de la nécessité d’adopter la conception chrétienne. — La non-résistance au mal par la violence est un des principes de la doctrine du Christ et doit être admise inévitablement par les hommes de notre époque. — Deux moyens de mettre un terme à toute lutte : le premier est de trouver des définitions générales du mal, obligatoires pour tous, et de lutter contre lui par la violence ; le deuxième — chrétien — est de ne pas employer du tout la violence contre le mal. — Quoique l’insuccès du premier moyen soit déjà constaté depuis les premiers siècles du christianisme, on a continué à l’appliquer et c’est seulement à mesure que l’humanité a avancé qu’il est devenu de plus en plus évident qu’il n’y a pas et ne peut y avoir de définition générale du mal. Aujourd’hui cela est évident pour tous et si la violence est toujours un moyen de lutter contre le mal, ce n’est pas parce qu’elle est toujours considérée nécessaire, mais parce que les hommes ne savent pas s’en affranchir. — La difficulté de cet affranchissement résulte de l’habileté avec laquelle le gouvernement emploie la violence. — La violence est maintenue par quatre moyens : l’intimidation, la corruption, l’hypnotisation et la force armée. — On ne peut pas s’affranchir de la violence gouvernementale par le renversement du gouvernement. — Par les épreuves de la vie païenne les hommes sont amenés à la nécessité d’adopter la doctrine du Christ, avec sa loi de la non-résistance au mal évitée jusqu’ici. — La conscience de la vérité de la doctrine chrétienne répandue dans notre monde amène aussi à cette nécessité. — Cette conscience se trouve en désaccord complet avec notre vie, ce qui est rendu particulièrement évident par le service obligatoire ; mais les hommes, sous l’influence de l’habitude et des quatre moyens de la violence gouvernementale, ne voient pas cette contradiction entre le christianisme et les obligations du soldat. Les hommes ne la voient pas même lorsque, avec une évidence complète, les autorités elles-mêmes montrent toute l’immoralité des devoirs du soldat. — L’appel sous les drapeaux est l’épreuve suprême pour chaque homme, c’est une proposition de choisir entre l’adoption de la non-résistance chrétienne et la soumission servile à l’organisation sociale actuelle. — Les hommes, en sacrifiant tout ce qui leur est sacré, se soumettent généralement aux exigences de l’organisation sociale et semblent ne pas voir d’autre issue. — Les hommes de la conception