Page:Tolstoï - Religion et morale.djvu/45

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d’antérieur, quelque chose de parfaitement solide et d’indépendant qui est debout à côté de la philosophie, qui n’a pas besoin des appuis fictifs dont on était celle-ci. Et on sent que la philosophie imagine pour la circonstance des thèses qui, soi-disant, lui épargneraient toute contradiction avec l’éthique, les lieraient mutuellement, et donneraient à l’éthique l’apparence d’être issue de la philosophie. Mais toutes des thèses de circonstance semblent justifier l’éthique chrétienne seulement tant qu’on les examine d’une façon abstraite. Sitôt qu’on en fait l’application aux questions de vie pratique, ce n’est pas seulement un désaccord, c’est une contradiction flagrante qui apparaît dans toute son intensité, entre les fondements philosophiques et ce que nous tenons pour la morale.

Le malheureux Nietzsche nous fournit un exemple particulièrement précieux de cette contradiction. Il est irréfutable, quand il dit que toutes les règles de la morale, considérées au point de vue de la philosophie non chrétienne de ce temps-ci, ne sont que mensonge et hypocrisie et qu’il est beaucoup plus avantageux, plus agréable et plus intelligent pour un homme de fonder une société d’« Uebermenschen », d’être l’un d’entre eux, que d’appartenir à la foule qui doit leur servir de marchepied.

Aucune des théories philosophiques dont les matériaux sont empruntés à une conception religieuse