Page:Tolstoï - Scenes de la vie russe.djvu/154

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Elle se tut, dépitée.

— Le temps deviendra meilleur, le chemin deviendra peut-être bon, et pour toi ce serait préférable ; nous partirions alors aussi bien tous ensemble.

— Je te demande pardon ! Si, depuis longtemps, je ne t’avais pas écouté, je serais maintenant à Berlin et en parfaite santé.

— Que faire, mon ange ?… Ce n’était pas possible… Tu le sais bien. Mais si tu restais encore un mois, tu te remettrais merveilleusement, je vaquerais à mes affaires, et nous emmènerions les enfants…

— Les enfants se portent bien, moi pas…

— Mais, pense donc, ma chérie, si par ce mauvais temps ton état allait empirer en route,… tu serais au moins à la maison…

— Que ferais-je donc à la maison ? Y mourir, dit la malade avec emportement.

Mais le mot « mourir » l’effraya. Elle leva sur son mari un regard suppliant, interrogateur.

Il baissa les yeux et se tut.

La malade fit tout à coup la moue comme une enfant et les larmes lui montèrent aux yeux.