Page:Tolstoï Les Cosaques.djvu/129

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Jeudi j’attendis la réponse.
Vendredi je la reçus.

On me disait de ne plus avoir d’espoir.
Samedi, je voulus me suicider.
Mais le dimanche soir je changeai d’idée !

Puis il reprenait : A ! di, di, di, di, di, li !

Et, clignant de l’œil, secouant ses épaules, il dansait en chantant :

Je t’embrasserai, je t’enlacerai dans mes bras.
Je te donnerai un ruban vermeil.
Tu seras mon Espérance, ma chère petite Espérance !
M’aimes-tu ? Me seras-tu fidèle ?

Il était tellement en train, qu’il dansait et sautait par la chambre.

Mais il ne chantait son di, di, li, et les airs de seigneur, comme il disait, que pour Olénine ; après trois verres de vin, il entonna la véritable chanson cosaque. Au milieu de ses airs favoris, sa voix se brisa, il se tut, mais ses doigts faisaient encore vibrer les cordes de la balalaïka.

« Ah ! mon ami ! » dit-il.

Olénine se retourna, frappé de l’accent étrange de sa voix ; le vieux Cosaque pleurait, une larme coulait sur sa joue.

« Mon temps, mon beau temps est passé et ne reviendra plus ! murmurait-il en sanglotant. — Bois donc ! » cria-t-il soudain d’une voix formidable et sans essuyer ses larmes.

Une chanson tcherkesse l’émotionnait particulièrement. Elle était courte, et son charme consistait en un refrain mélancolique : « Aï ! daï ! dalalaï ! » Jérochka en traduisit les paroles.

« Un jeune Tcherkesse était allé dans les montagnes ; les Russes vinrent en son absence, brûlèrent l’aoul, massacrèrent les hommes, emmenèrent les femmes en escla-