Page:Tolstoi et les Doukhobors.djvu/85

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saques de sortir son fusil de l’étui. Voyant qu’on se préparait à tirer sur eux, les frères sont tombés à genoux en disant :

« — Que Dieu vous pardonne et qu’il nous pardonne ! »

« Mais le gouverneur ordonna de rengaîner le fusil et de nous battre à coups de fouet ; ce qui fut fait. Quand nous fûmes tous arrivés à Bogdanovka, les greffiers appelèrent tous les chefs de famille, qu’on laissa partir chez eux. »

Ensuite commença le cantonnement des soldats dans les villages doukhobors. Cette mesure s’emploie comme punition à l’occasion des révoltes populaires ; elle consiste à envoyer, dans les villages rebelles, un détachement de soldats qui vivent dans les maisons des habitants ; on donne aux soldats le droit de profiter des biens des habitants et de traiter le village en pays conquis. La cruauté de cette mesure dépend de la licence laissée par les autorités aux abus et au sans-gêne des soldats cantonnés. Il était difficile d’attendre quelque adoucissement de la part du commandant qui, avec ses Cosaques, avait torturé des hommes tout à fait innocents.

« Deux cents Cosaques, — m’a raconté le