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L’EXODE

donnent la chasse aux uhlans qui s’aventurent dans les Flandres. Mes bonnes religieuses perdent la tête et me font souvent perdre la mienne. Si le désir de soigner des soldats vous tourmente la conscience, venez : vous me serez très utile. Et je vous promets de la besogne, en attendant que vos dames du monde aient organisé leurs hôpitaux. »

Laissant Marthe et Lysette chez M. Forestier, l’écrivain partit pour Ypres, heureux de revoir sa ville natale et le Dr Claveaux, son ami d’enfance, qu’il estimait et admirait, sans toutefois l’aimer d’instinct, car il restait entre eux des rivalités de jeunesse, des jalousies d’ambition, que l’âge, heureusement, avait fort amorties.

En dépit d’eux-mêmes, ils se voyaient avec plaisir. Le médecin appréciait la conversation de Philippe, et celui-ci retrouvait à Ypres l’odeur ancienne, un peu surannée, pourtant délicieuse de la province. Et, maintenant que la guerre dévastait le pays, il ouvrait toute son âme à ces souvenirs du temps heureux, où l’on vivait sans craindre les Barbares, sans être menacé de leur culture, de leur infâme civilisation…

II


Avant la guerre, Philippe allait tous les ans à Ypres, chez le Dr Claveaux.

Chaque fois, il échappait avec un sentiment de déli-