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Page:Torcy (Blieck) - L'exode, 1919.djvu/154

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TROISIÈME PARTIE

— Mais, c’est la comtesse de Vryberghe ! s’écria Sylvain, qui passa les rênes à Philippe.

Et, sautant de voiture, il s’empressa vers elle.

Grande et d’un type impérieux, elle avait la poitrine couverte d’une croix rouge, un tablier blanc sur une robe élégante, et ses attitudes, sa déclamation un peu trop solennelle faisaient penser à une infirmière mondaine, prête à jouer un rôle sublime sur un théâtre de salon.

— Ah ! docteur, je vous ai reconnu à votre jument noire… Et ce blessé, vous allez le voir aussi ?… Nous le transportons chez moi, n’est-ce pas ?… J’ai trente lits, deux nurses anglaises et le docteur Bidou, en permanence…

— Mais, dit Sylvain, je ne sais si nous en avons le droit. J’ai envoyé le garde téléphoner, afin qu’on envoie d’Ypres une ambulance de l’hôpital militaire.

— À quelle heure a-t-il téléphoné ?

— Il y a une demi-heure, à la gare de Poelcapelle.

— Mais c’est insensé, docteur ! Je prends sur moi de soigner ce blessé ! Je n’entends point qu’on me l’enlève !

— Bien, madame la comtesse. Mais j’ignorais absolument que vous eussiez une installation de secours.

La comtesse jeta à son chauffeur :

— Henri, la troisième vitesse ! Un louis, si nous arrivons à temps !

Et elle laissa le Dr Claveaux décontenancé au carrefour des deux routes.

— Aussi bien, fit-il, nous pouvons retourner.