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L’EXODE

Puis, s’adressant au garde :

— Mon brave, je n’ai plus rien à voir en cette affaire. La comtesse va transporter votre Allemand.

Peu après, sur le chemin d’Ypres, où Cocotte, flairant son écurie, trottait allègrement, une auto de l’ambulance militaire croisa le cabriolet dans un tel nuage, qu’il fallut s’arrêter en attendant qu’il s’abattît.

— C’est la course au uhlan ! dit Sylvain, quand il osa prendre haleine. Je suis sûr qu’il a mis en émoi toutes les autos des environs,

En effet, le lendemain, téléphonant à la comtesse, le médecin apprit qu’elle était arrivée trop tard. C’était le baron de Bossart qui avait « décroché le uhlan ». Aussi les châtelains de la région enviaient-ils sa bonne fortune. Un uhlan blessé ! Quelle aubaine pour ceux qui craignaient de voir leur château dévasté par les envahisseurs !

Chaque fois que les Allemands, pour justifier leur barbarie, accusèrent les civils des plus lâches cruautés, Philippe se rappela le uhlan d’Ypres qui avait soulevé tant de poussière, éreinté le garde champêtre, fourbu la vieille Cocotte et fait perdre à Sylvain trois longues heures, sous un soleil à brûler les moissons.


Un des premiers jours d’octobre, au retour d’une visite à la campagne, Philippe et le Dr  Claveaux rencontrèrent deux paysans, l’homme et la femme, qui tiraient une petite charrette.