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TROISIÈME PARTIE

d’un regard oblique, surveillant les fenêtres des maisons.

Quand ils se furent assurés qu’elles ne cachaient point de francs-tireurs, le gros de l’armée commença d’inonder la ville.

Jusqu’à huit heures du soir, il arriva des cavaliers, des fantassins, des canons, des mitrailleuses, des cuisines, des autos, des trains de pontonniers, d’aviation, des chariots, des charrettes, et toute espèce de véhicules réquisitionnés en route avec chevaux, bétail et paysans.

Comme le Dr Claveaux arrivait chez lui, il aperçut un rassemblement devant le seuil d’une maison voisine. S’approchant, il vit un officier frapper de la crosse de son revolver la porte sculptée qui tardait à s’ouvrir. Il tenait un cheval par la bride et, sans doute, cherchait une écurie.

Sachant que la maison était vide, le médecin, écartant la foule, s’approcha de l’officier, et, dans un flamand qu’il tâchait de durcir pour lui donner une apparence allemande, il essaya de faire comprendre à l’intrus que les occupants de l’immeuble avaient quitté la ville.

Pour toute réponse, l’officier lui poussa son revolver contre la poitrine :

— Schnell ! aboya-t-il, en rougissant de fureur.

Le médecin comprit qu’il fallait obéir.

Il courut chez Clamotte, l’antiquaire ébéniste, qui par bonheur se trouvait chez lui.