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QUATRIÈME PARTIE

bien plutôt les eût-elle accordées au moindre lieutenant aviateur qu’au politicien le plus grassement calé dans une automobile.

Quant à son mari, elle l’avait oublié.

Ce fut par Yvonne que Philippe apprit la mort d’Axel.

Pour ne point retarder le départ des Sauvelain, qui l’avaient recueilli chez eux, il était parti chez ses parents. Epuisé par la maladie, par les horreurs de l’invasion, par le dégoût d’un monde où rien ne survivait de ce qu’il avait aimé, il était revenu sous le toit paternel demander un lit pour y fermer les yeux.

Jusqu’à son dernier jour, il se réfugia dans le souvenir de sa femme. Quand le prêtre vint, portant les saintes huiles, Axel détourna son front mouillé de sueur. L’espoir en Dieu ne lui était plus possible. Il se refusait, d’ailleurs, à l’idée d’une autre existence, et il mourut, exprimant le désir que son âme se perdît dans le néant.

Vers ce temps, le Dr  Claveaux partit pour le nord de l’Angleterre. Sans attendre le Big Push, il s’était assuré une médiocre situation dans une ville du Yorkshire, où il soignait la colonie des réfugiés.

Il décrivit passionnément à Philippe cette ville sombre et fumeuse, toute en maisons ouvrières, sordidement pareilles, sans une couleur vive, et dont les arbres noirs de suie étaient rabougris et malades comme la population de cet enfer industriel…