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L’EXODE

Chaque jour, quand Philippe revenait du Refuge, il trouvait Marthe et Lysette plus accablées d’ouvrage.

— Monsieur Van Weert est parti ?

— Il est allé lire les dépêches, à l’Hôtel de ville.

— Et sa femme ?

— Elle est au Club des Dames Anglaises.

Lysette minaudait alors :

— Croix-Rouge et five o’clock.

— Tais-toi, mauvaise langue ! réprimandait la mère.

Et, pour adoucir son mari, elle ajouta :

— Que veux-tu ! Comme disait madame Grassoux, il faut bien s’entr’aider.

Vers la fin de janvier, découragé des lenteurs de la guerre, Philippe rentrait chez lui, le front pensif, lorsque les Van Weert l’accueillirent tout radieux.

— Enfin, le voilà ! cria-t-on, dès qu’il ouvrit la porte.

— Eh bien ! que se passe-t-il ?… Les Allemands sont repoussés ?

— Pas encore, dit M. Van Weert, mais il s’agit d’autre chose… Imaginez-vous, mon cher, qu’on nous emmène en province !

— Ah !… qui cela ?

— Un Anglais, marchand de cuir à Smokefield. Un monsieur très bien, vrai gentleman, et qui parle français comme vous et moi… Nous l’avons reçu en votre absence.

— Il venait pour moi ?

— Mais… fit M. Van Weert, qui parut gêné, c’est toute une histoire.