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L’EXODE

Mme  Van Weert, qui ne se sentait pas à l’abri de tout reproche.

— Certainement, répondit Philippe, il ne fallait pas manquer une occasion si favorable.

— Surtout, reprit M. Van Weert, que nous devrons attendre trois ans encore avant que cette satanée guerre finisse.

— Comment… trois ans ?

— Il paraît, mon pauvre Philippe. C’est l’avis de lord Kitchener… Monsieur Robinson assure, de son côté, que les Anglais font à Dunkerque et à Boulogne des baux de trois ans. Ce qui donne à penser que les sphères officielles sont moins optimistes que la presse.

— Trois ans ! répétait l’écrivain, en marchant de long en large. Bien vrai, il serait plus simple de nous supprimer tout de suite !… Si j’avais encore la force de porter un fusil, j’aurais du moins la gamelle assurée, puis Marthe pourrait accepter de quoi vivre du gouvernement…

— Mais, mon ami, interrompit doucement sa femme, si la guerre dure trois ans, nous aurons besoin que tu nous soutiennes. Il y a ici des millions de jeunes gens plus capables que toi de porter un fusil.

— Je le sais ; mais encore faudra-t-il que je trouve une situation. Et je vois ce qui se passe au Refuge. On y est généreux, on ne se refuse pas à nourrir, à loger les Belges ; mais on ne fait aucun effort pour les aider à se procurer du travail. Alors, que devien-