Page:Toulet - Béhanzigue, 1921.djvu/100

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ressentir combien ces violences étaient en quelque sorte salutaires à l’expression de son amour ; d’où je commençai à me mettre parfois dans le cas d’être battue ; et, encore que j’éprouvasse quelque honte à des traitements qui n’allaient pas sans indiscrétion, les plaisirs dont la suite nous en comblait tous deux, faillirent, à plusieurs fois, me faire partager cet étrange sentiment des femmes russes, dont on veut qu’elles se réjouissent en même temps (je rougis à l’écrire) d’être traitées comme si elles portaient encore jupes courtes, et comme si elles en étaient néanmoins du tout privées.

Et trop heureuse encore si les pires avilissements avaient pour toujours enchaîné mon cher d’Armentières. Ah ! pour quoi fallait-il qu’il me quittât, et pour ma meilleure amie pour cette même Mme de la S… qui avait assisté, pour ainsi dire, à nos premiers embrassements, et que j’en avais vue déjà toute frémissante d’un désir contenu.

Ils s’aimèrent ; bientôt je le sentis à mille signes. Armentières absent, tout ne lui était plus qu’ennui, et chaque instant d’une durée interminable, « long, disait-elle, comme un jour sans peine ». Apparaissait-il, tous deux couraient l’un vers l’autre comme pour s’annoncer les plus graves nouvelles Mais déjà ils ne savaient plus que se dire ; immobiles et l’air contraint, ils s’embarrassaient en de vaines paroles ; je ne devinais plus le sens caché de ces tremblantes voix qu’à l’amour qui leur criait par les yeux. Et jamais elle ne fut plus désirable que timide ainsi et vaincue, avec son pâle visage, et