Page:Toulet - Béhanzigue, 1921.djvu/174

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buvaient de l’alcool de riz… — Mon Dieu ! quel coup de vent : la maison, cette fois, va être emportée….Ce sera drôle de nous voir courir après, comme un Monsieur dont le chapeau roule dans la rue. Ce sera très drôle. Ah, que i’ai envie de rire… et que j’ai peur : l’ouragan…, je sens qu’il me déteste. — Dans cette baraque, donc, de Cauailles, mon compagnon me fit remarquer, servant les coolies, une fille annamite bien inattendue : teint mat, profil busqué, bouche orgueilleuse ; une merveille.

— Elle est belle, n’est-ce pas, j’ai envie de l’acheter.

— Elle n’est pas, lui dis-je, aussi belle que Prahly.

Mais il ne comprit pas. Il n’y a que moi qui te comprenne, Prahly ; il n’y a que moi qui t’aime, à travers la triple épouvante de la nuit, de l’opium et de la tempête.

Nostalgie. —… Nous fîmes voile vers l’île de Tapolrane.

Les bords montueux du Cathay s’abîmèrent lentement à l’horizon. Là, ce n’était encore que le matin de l’été ; et le lotus à la longue tige n’avait pas commencé de fleurir ces eaux sacrées où se reflète la tombe de Gia-Long. Mais, sur les étangs de Candy, nous en vîmes déjà sourire. Il y en avait d’un peu roses — comme les genoux de Prahly. Il y en avait de blancs, comme ces légers tissus dont je la vis naguère, dans sa hâte d’être aimée, joncher l’appartement, au crépuscule.

… Après avoir, de là, reconnu le Coromandel, ce fut la populeuse Calcutta, où il faisait chaud. J’y achetai des letchi, au marché : mais qu’ils furent loin de valoir ceux de Bourbon