Page:Toulet - Béhanzigue, 1921.djvu/66

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Chariclée Ordapuy (ou : Ord’Apuy, si, à son instar, vous l’aimez mieux), attendait Béhanzigue au Péristyle, parmi les drapeaux tricolores qui marquent le Pavillon de Marsan. Dans son omnibus de cœur, c’est le dernier numéro, Béhanzigue. Car, depuis qu’au soir de ses noces, cette fleur de l’oranger bourgeois s’envola de chez son vieil époux, le marquis Odoacre Odoacri (des ducs de Sorr et de Sénégaille), Chariclée ça et là vire ; et rien de ce qui est viril ne lui est étranger. Non, et non pas même les arts plus délicats de son sexe. Ce jour là, toutefois, elle est seule.

— Vous êtes en retard, Monsieur Béhanzigue, dit-elle d’un air amoureux. (N’est-ce pas Mme du Deffand, qui professait que tout fait ventre ? )

— Hélas, Madame, déjà j’étais en plein Cathay, répond le baron de Béhant. Un marchand de vin, où j’entrai rêver plus à mon aise, avait d’un tel Arbois, qu’il a failli vous faire attendre.

De la main, il essuie ses moustaches jaunes, ses moustaches en poil de balai.

— J’ai. attendu, Monsieur Béhanzigue. Mais quoi… si vous rêviez…

Maladroitement, comme les trop grandes femmes à trop hauts talons, les genoux en avant, gracieuse et gauche, elle va s’accouder contre un de ces anguleux Carrier-Belleuse, qui sont aussi maigres qu’elle-même…