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IDYLLE DE PARIS


Depuis leur enfance, Christine Séguovin et René Lampourde s’aimaient tendrement.

Cette noire maison de la rue d’Aguesscau, où tous deux étaient nés à deux ans près, et tous deux, porte à porte, au sixième étage, cette maison dont les murs semblaient pleurer de tristesse, et dont la cour verdâtre avait l’air d’un puits où l’âge aurait percé des trous, tout petits ils l’avaient ensemble peuplée de rêves, et peinte au prisme de leurs espérances.

— Quand je serai grand… disait-il.

— Quand je serai grande… disait-elle.

— Je serai riche, et je ne ferai rien, comme fait papa, le lundi.

— J’aurai des belles robes, et on ne me fouettera plus.

— Et je t’embrasserai tout le temps.

On les envoya à l’école ; ils y allaient et revenaient ensemble, toujours aussi ardents à se quereller, à se défendre, à se trahir ; et le temps passait paisiblement, quand une catastrophe vint troubler ces amours naissantes.