à cet éternel, insipide, insupportable jargon français de Pétersbourg !
— Potoughine, dites-vous, connaissait cette…
— Il m’est pénible de me souvenir de cela, interrompit encore Irène. Élise était ma meilleure amie à la pension, et ensuite, à Pétersbourg, nous nous voyions perpétuellement. Elle me confiait tous ses secrets : elle était très malheureuse, elle a beaucoup souffert. Potoughine s’est admirablement conduit dans cette histoire, comme un vrai chevalier. Il s’est dévoué ; c’est alors seulement que je l’ai apprécié. Mais nous voici encore loin de notre sujet ; j’attends votre récit, Grégoire Mikhailovitch.
— Mais mon récit ne peut guère vous intéresser, Irène Pavlovna.
— Ceci n’est plus votre affaire.
— Souvenez-vous, Irène Pavlovna, que nous ne nous sommes pas vus durant dix ans, dix ans entiers. Combien d’eau a coulé depuis ce temps !
— Pas de l’eau seulement, répliqua-t-elle avec amertume ; c’est pourquoi je veux vous écouter.
— Je ne sais d’ailleurs par où commencer.
— Par le commencement. Du jour que vous…, que je suis partie pour Pétersbourg. Vous avez alors quitté Moscou… Savez-vous que depuis cette époque je ne suis jamais revenue à Moscou !
— Vraiment ?
— C’était d’abord impossible ; puis, quand je me suis mariée…
— Vous êtes mariée depuis longtemps ?