Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/207

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Il ne nous reste aucune Médaille, que je sçache, des Roys, ou plutost des Tyrans de cette ville. L’extrait que Photius nous a conservé de Memnon, nous doit consoler de la perte de l’histoire que Nymphis d’Heraclée avoit faite de sa patrie. Non seulement cet auteur se rendit illustre par ses écrits, mais encore par cette Ambassade fameuse où il obligea les Galates à se retirer, dans le temps qu’ils mettoient tout à feu et à sang dans la campagne d’Heraclée.

Cette ville ne fut pas seulement libre dans les premiers temps, mais recommandable par ses Colonies. Clearque un de ses citoyens, qui pendant son exil avoit etudié à Athenes la Philosophie de Platon, y fut rappellé pour appaiser le peuple qui demandoit de nouvelles Loix et une nouvelle repartition des terres ; le Senat s’y opposoit puissamment, mais Clearque qui n’avoit pas l’esprit Platonicien se rendit maître des affaires, à la faveur du peuple ; il commit mille cruautez dans la ville, et Diodore de Sicile assûre qu’il avoit pris pour modele dans l’art de regner, Denys de Syracuse. Theopompe, fameux historien de Scio, rapporte que les citoyens d’Heraclée n’osoient aller faire leur cour à Clearque, qu’ils n’eussent auparavant déjeuné avec de l’herbe de la Rhüe, bien informez qu’il leur feroit présenter un verre de Cigüe pour les envoyer moins cruellement en l’autre monde.

Clearque fut tué la douziéme année de son regne, pendant les Bachanales que l’on celébroit dans la ville. Diodore assûre que son fils Timothée fut éleû en sa place et qu’il regna 15 ans ; mais Justin fait succeder à Clearque son frere Satyrus. Suidas même assûre que Clearque ne fut pas le premier tyran d’Heraclée, puisqu’il vit en songe Evopius autre tyran de sa patrie ; et Memnon, à qui il faut s’en rapporter, puisqu’il avoit employé douze