Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/339

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à la fin d’Avril aux environs de Paris. La maniére de labourer ces terres est encore plus surprenante, car on attache jusques à dix ou douze paires de Bœufs à une charruë. Chaque paire de Bœufs a son postillon, et le laboureur pousse encore le soc avec le pied ; tous leurs efforts aboutissent à faire des sillons plus profonds qu’à l’ordinaire. L’expérience sans doute leur a appris qu’il falloit creuser bien avant, soit pour mêler la terre superficielle qui est trop seche, avec celle de dessous qui l’est moins, soit pour garentir les graines des grandes gelées, car sans cela ils ne prendroient pas tant de peine et ne feroient pas tant de dépense inutilement. Nous en demandâmes plusieurs fois la raison à nos conducteurs, qui se contentérent de nous dire que c’étoit la mode du pays. On ne voit aucun arbre parmi ces champs, mais seulement quelques Pins que l’on traisne sur les grands chemins pour les conduire dans les villes et les villages, en y attelant autant de Bœufs qu’il en faut pour les transporter. Cela ne nous surprenoit pas. On ne rencontre autre chose en Armenie que des Bœufs ou des Bufles attelez ou chargez à dos comme des mulets. Les Pins cependant, de l’aveu des gens du pays, commencent à devenir fort clair semez, et l’on en découvre peu qui levent de graine. Je ne sçai comment ils feront quand on aura coupé tous les grands arbres, car ils ne sçauroient bâtir sans ce secours ; je ne dis pas les meilleures maisons où l’on n’employe les poutres que pour soutenir les couverts ; je parle des chaumieres qui sont les maisons les plus communes, dont les quatre murailles sont fabriquées avec des Pins rangez par la pointe, à angles droits, les uns sur les autres jusques au couvert, et arrêtez dans les coins avec des chevilles de bois. Nous ne trouvâmes aucune Plante nouvelle ce jour-là, et nous fûmes un peu allarmez de voir parmi quelques Plan-