Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/389

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voir des Orties, de l’Eclaire, et du Melilot sur le chemin du Paradis Terrestre. Il y en a pourtant, aussi-bien que de l’Origan commun, et des Mauves ordinaires. Le Dictame blanc est parfaitement beau à l’entrée de ces montagnes, où l’on sentoit une fraischeur qui faisoit grand plaisir.

Nous ne fûmes gueres plus heureux en Plantes, le lendemain 28 Juillet, et je commençai à douter si nous allions vers le Paradis Terrestre, ou si nous lui tournions le dos ; car enfin aprés avoir marché, depuis deux heures aprés minuit jusques à sept heures du matin, dans des montagnes couvertes de bois et de pâturages, nous ne trouvâmes sur les grands chemins que du Millet, du Marrube noir et blanc, de la Bardane, de la petite Centaurée, du Plantin, sans répeter les Orties et les Mauves du jour precedent. Comme l’ennui ne donne pas beaucoup d’appetit ; que d’ailleurs toute matiere d’erudition nous manquoit, et que nous avions lieu d’apprehender, de ne voir dans nôtre pretendu Paradis Terrestre, que les ronces et les chardons que le Seigneur y avoit fait naître aprés la cheûte du premier Homme, nous aurions fort mal passé nôtre temps sans une espece admirable de Ciboulette dont la fleur sent le Storax en larme. Ses feüilles et ses racines qui ont l’odeur de la Ciboule d’Espagne, nous firent trouver plus de goust aux provisions qui nous restoient.

La racine de cette Plante est presque ronde, assez douce, et d’une odeur qui participe de celle de l’ail et de l’oignon. Les cayeux qui l’accompagnent forment une teste d’un pouce de diametre. La tige s’éleve à deux pieds et demi, épaisse de deux ou trois lignes, solide, lisse, couverte d’une fleur ou poussiere semblable à celle des Prunes fraiches, et garnie de quelques feüilles d’un