Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/91

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maux, sur les plantes, sur les morts. Ils croyent qu’elle est agréable à Dieu parce que les hommes qui veulent se servir de leur raison, ne manquent jamais de rien ; au lieu que les animaux, n’ayant aucune raison, leur instinct les expose souvent à chercher leur vie aux dépens de leur vie même. Dans les bonnes villes on vend de la viande au coin des ruës, pour la distribuer aux chiens : quelques Turcs par charité les pancent de leurs blessures, et sur tout de la galle dont ces animaux sont tres-mal traitez sur la fin de leurs jours. On voit des personnes de bon sens, qui par devotion portent de la paille pour les mettre coucher à leur aise, ou pour soulager les chiennes qui viennent de mettre bas : il y en a qui leur bâtissent de petites huttes pour les mettre à couvert avec leurs petits. On aura de la peine à croire qu’il y ait des fondations établies par des testamens en bonne forme, pour nourrir un certain nombre de chiens et de chats pendant certains jours de la semaine ; cependant c’est un fait constant, et l’on paye dans Constantinople des gens pour exécuter l’intention des testateurs, en distribuant dans les carrefours la nourriture à ces animaux ; les bouchers et les boulangers ont souvent de petits sons destinez à cet usage. Les Turcs avec toute leur charité haïssent les chiens et ne les souffrent pas dans leurs maisons ; en temps de peste ils en tuent autant qu’ils en trouvent, persuadez que ce sont des animaux immondes qui infectent l’air.

Au contraire ils aiment beaucoup les chats, soit à cause de leur propreté naturelle, soit parce que ces animaux sympathisent avec eux par leur gravité, au lieu que les chiens sont folâtres, étourdis, remuans. D’ailleurs les Turcs croyent, par je ne sçai quelle tradition, que Mahomet aimoit si fort son chat, qu’étant un jour consulté sur quelque point de religion, il aima mieux couper le parement