Aller au contenu

Page:Tousseul - Aux hommes de bonne volonté, 1921.djvu/45

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

petits hommes très sages : ils feront leur devoir. Ne leur apprend-on pas, à l’Orphelinat, l’amour du Bon Dieu, l’amour du prochain, l’amour des papas malheureux… ou méchants ? Il y a dans ces trente-huit « petits noirs » des enfants abandonnés. Les « chères sœurs » leur ont répété, entre une leçon de grammaire et une leçon d’arithmétique, que le Bon Dieu, les riches, les pauvres, les choses, les bêtes, les mamans et les papas sont bons.

Et voilà qu’ils vont en douter, de cette universelle Charité ! Il fait faim, il fait froid, il fait noir là-dedans ! Les « chères sœurs » n’ont plus rien à leur donner. Le magasin communal ne leur livre pas de pommes de terre parce qu’ils n’ont pas l’argent… que leur doit le Bureau de bienfaisance ! Deux « dames en noir » sont parties la semaine dernière pour un pays de bourses et de portes closes. Après trois jours, elles sont revenues… avec cinq francs et une grippe ! Il leur reste, à ces claquedents, un tout petit peu de céréaline pour étourdir leur grosse faim. Et puis ?… Et puis ça, c’est votre affaire, lecteur !

Serait-il vrai que les « ventres pleins n’ont point d’oreilles » ? Riche, vous portez à votre petit doigt quelque chose qui vous empêcherait de tenir une pelle, si vous étiez réquisitionné. Madame, votre broche éclipse la belle eau de vos yeux. On pourrait nourrir mes petits gueux durant un mois avec ces machins-là. Ce n’est pas très gai, ce que je vous raconte. Pourquoi faut-il qu’on vous épanouisse la rate pour que s’ouvre votre bourse ? Et tenez ! — ceci dit sans vouloir vous froisser — il y a peut-être un enfant de votre cousin dans ces petits-là. N’en rougissez pas : faites l’aumône à vos cousins, au risque de ne ravoir pas un coup de casquette.

Ouvrier, mon frère, tu as des enfants. Que deviendront-