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Page:Tremblay - Pierre qui roule, 1923.djvu/55

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PIERRE QUI ROULE

chettes plus basses, que l’on poussait sous le lit pendant la journée, un banc-lit qui servait de sofa durant le jour et de couchette durant la nuit, un dressoir, une armoire, l’indispensable ber et des ustensiles de cuisine complétaient à peu près l’ameublement. Le devant de la maison, soigneusement sablé, ratissé, balayé et entretenu donnait une apparence proprette à ces agrestes demeures.

On était très hospitalier, très porté à s’entr’aider. Nul ne songeait à faire boucherie sans envoyer aux voisins un rôti de lard frais, accompagné d’une douzaine de bouts de boudin. La messe de minuit, suivie de plantureux réveillons où l’on consommait force ragoûts, tourtières, beignes et tartes, les fêtes de Noël, du Jour de l’An, des Rois, les jours gras, Pâques et la Sainte-Catherine fournissaient autant d’occasions de se réjouir. Pour être moins joyeuses, les manifestations religieuses du Jour des Morts, de l’Avent, du carême et de la semaine sainte n’en attiraient pas moins la foule à l’église. Après les offices de la Toussaint Quéquienne aimait à prendre son tour pour sonner le glas ininterrompu qui annonçait la commémoration des défunts.

L’ÉMIGRATION

On ne s’ennuyait pas à Sainte Victoire où il n’y avait pourtant ni théâtre, ni cinéma, ni salle de billard, ni piano, ni même de phonographe. Et cependant, l’émigration aux États-Unis commençait à dépeupler la paroisse. Trois des jeunes filles d’un habitant qui paraissait à l’aise étaient parties avec une autre famille pour aller travailler dans les manufactures de la Nouvelle-Angleterre. Deux d’entre elles étaient revenues avec de belles robes de soie. L’autre