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Page:Tremblay - Pierre qui roule, 1923.djvu/63

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PIERRE QUI ROULE

cessité la suspension des travaux de fabrication à Fisherville, la famille Quénoche avait trouvé à East Douglas quelques semaines de travail qui furent également suivies d’un chômage forcé. Pour ne pas manquer d’ouvrage, les nouveaux arrivés devaient se résigner à de fréquents déménagements. Ils trouvaient à s’engager dans les fabriques où il y avait un besoin immédiat de main-d’œuvre ; mais on n’hésitait pas à les remplacer avant de leur donner le temps nécessaire pour acquérir la dextérité des anciens, dès qu’on pouvait leur substituer quelques-uns de ces derniers.

Ici, c’était l’eau qui manquait pour la force motrice ; là, il fallait arrêter la grande roue pour réparer d’anciennes machines ou en installer de nouvelles ; ailleurs, il y avait eu surproduction et l’on enrayait les travaux pour attendre la hausse des produits. Une crise industrielle semblait imminente. Les perspectives étaient peu encourageantes pour les Canadiens nouvellement expatriés.

Toute la vallée de la rivière Blackstone était déjà ponctuée de petites villes et de villages manufacturiers. Étroitement encaissée entre des collines assez élevées, cette rivière prend sa source dans l’État du Massachusetts, aux environs de Worcester, entre dans l’État du Rhode Island à Woonsocket, reçoit un certain nombre de tributaires peu volumineux qui lui apportent leurs eaux contaminées par l’utilisation des forces hydrauliques et promène ses méandres jusqu’à la mer, la distance à vol d’oiseau entre sa source et son embouchure étant d’environ 50 milles.

L’eau de cette rivière était encore assez claire pour que l’on prit plaisir à s’y baigner et à y faire la pêche.

Depuis les manufactures se sont tellement agrandies et multipliées sur ses bords qu’on n’y voit plus ni baigneurs ni poissons, ses eaux étant empoisonnées