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Page:Tremblay - Pierre qui roule, 1923.djvu/72

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PIERRE QUI ROULE

quelles circonstances le fait s’était produit : L’Américain était assis sur un garde-fou placé au sommet d’un escalier, et plaisantait avec Quéquienne, lequel était assis sur le plancher. À un moment donné, Quéquienne, sans penser à mal, saisit le pied du grand escogriffe. Celui-ci crut, ou feignit de croire, qu’il avait voulu le précipiter à l’étage inférieur.

Il renversa Quéquienne et lui piétina la figure. Il n’était pas chaussé ; mais Quéquienne trouva qu’il n’avait rien de commun avec Achille aux pieds légers. Quéquienne se releva et empoigna son antagoniste avec assez de vigueur pour lui imprimer ses dix doigts sur la poitrine à travers la mince chemise qu’il portait. Ce fut alors que notre jeune lutteur encaissa le gnon le plus mémorable de son existence. À rapprocher du récit suivant : « Il ne perd pas de temps, il me flanque un coup de poing. Je ne perds pas de temps, j’en reçois un autre. »

Un dimanche, Quéquienne et son frère, à peine guéris des fièvres causaient paisiblement en se rendant à l’église. Ils avaient l’outrecuidance de se servir de leur langue maternelle, ce que les galopins anglophones ne pouvaient tolérer. Dans la grande rue, une bande de morveux leur tomba dessus à bras raccourci. Les tignasses de nos gars ne donnaient guère prise aux assaillants. Les cheveux, déracinés par la fièvre n’offraient plus de résistance. Les jeunes Quénoche se défendaient de leur mieux et les voyoucrates n’avaient fait qu’une mince récolte capillaire lorsque survinrent deux. Canadiens, qui eurent peu de peine à rétablir l’ordre.

Quéquienne avait fini par se dire que, dans un pareil milieu, le meilleur moyen d’éviter les querelles était de cogner ferme sur ceux qui entreprenaient de le maltraiter. Et voilà comment nous le trouvons à l’école de Manville, concourant pour le premier prix