Ayant constaté que Quéquienne savait se tirer d’affaires lorsqu’on lui opposait un adversaire de sa taille, les anglophones de la salle où il travaillait à la Hamlet résolurent de le faire battre par un gaillard plus gros, un peu plus grand et surtout plus âgé que lui. Les deux champions avaient déjà chacun un œil au beurre noir et le combat restait indécis lorsque, avec un fair play que je n’hésite pas à qualifier de britannique, l’un des grands donna un croc en jambe à Quéquienne qui tomba et reçut plusieurs coups avant de se relever. On lui criait d’admettre que les Irlandais valaient mieux que les Canadiens, mais lui, couvert de sang, avait ramassé une bobine à pointe et défiait toute la bande lorsque le contre-maître arriva et renvoya les deux combattants à leur travail. C’était par de délicates attentions de ce genre qu’on entretenait l’amitié à Woonsocket où la famille Quénoche revint au printemps de 1860.
À « SOCIAL »
Sans se faire la moindre idée de ce que pouvaient avoir d’impoli certaines expressions dont, son entourage se servait constamment, Quéquienne ornait parfois sa phrase anglaise d’épithètes dont il ne soupçonnait pas la vulgarité. Il travaillait à la « Social », lorsque, s’adressant à son supérieur hiérarchique, il lui échappa un de ces vocables énergiques mais peu courtois. L’interpellé était un Anglais, immigré en même temps que le contre-maître, et ces deux derniers étaient partisans du châtiment corporel comme moyen de discipliner les ouvriers en bas âge.
Le fileur Mair alla donc trouver son compatriote, le contre-maître Jackson, pour lui dénoncer le crime commis par Quéquienne. Celui-ci, mandé devant le contre-maître, lui fit dire que, s’il avait à lui parler, il pouvait venir le trouver. Il vint, mais appor-