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tution. Les Jurisconsultes marquent d’ordinaire trois sortes d’actions mixtes : l’action de partage entre cohéritiers ; l’action de partage entre associés qui possèdent quelque chose en commun ; & l’action de bornage entre voisins, pour planter des bornes entre leurs héritages. Mais dans la pratique commune la plupart des actions réelles sont mixtes en même-temps, à cause de la restitution des fruits & des intérêts auxquels le détenteur est personnellement obligé. Ainsi une action n’est purement réelle que quand elle s’attache uniquement à la chose, & que le détenteur est quitte en l’abandonnant. Quand il s’agit de servitudes, on distingue deux sortes d’actions : confessoires & négatoires. L’action consessoire, est celle par laquelle un voisin prétend un droit de servitude sur son voisin : & l’action négatoire, celle par laquelle le voisin soutient son héritage franc & libre de toute servitude. Il y a aussi entre l’acheteur & le vendeur une espèce d’action particulière : c’est l’action redhibitoire, par laquelle l’acheteur peut contraindre le débiteur à reprendre une marchandise défectueuse : par exemple, un cheval vicieux. On appelle action en complainte, celle qui est intentée en cas de saisine & de nouvelleté en matière profane, ou simplement complainte en matière bénéficiale. Action de garantie, Action de rapt, de stellionnat. On dit aussi, une action d’injures. On ne donne point d’action de larcin contre une femme, mais seulement l’action pour les choses soustraites. Il ne faut pas se mettre en possession par violence & voies de fait, mais venir par action. Le titre 6. du quatrième Livre des Institutes de Justinien, contient les plus célèbres actions introduites par le Droit Romain, qui sont en grand nombre. On trouve là dans un grand ordre toutes les divisions & subdivisions des actions, & les diverses formules dont se servoient les Romains ; dans lesquelles il falloit être si prudent, & se renfermer si précisément, que celui qui y manquoit, étoit déchu de sa prétention au fond. C’est pourquoi la matière des actions est proposée dans les écoles comme un monstre invincible, à cause des obscurités & des difficultés qui s’y rencontrent. En France on ne suit point les formules, ni l’ordre judiciaire des Romains. Il n’est pas besoin de qualifier positivement l’action que l’on intente ; il suffit de former la demande, & d’en exposer le sujet. Un défaut de qualification, ou dans la manière, n’annulle pas le droit & l’action du demandeur.

Action, en choses morales, signifie un Acte, une œuvre. Actio, factum. Il faut faire de bonnes actions pour gagner le ciel. Il a fait une action digne d’être immortalisée. Il faut compter la vie des hommes par leurs actions & non point par leurs années. S. Evr. Cet homme a tant fait d’actions folles & extravagantes, qu’il n’ose plus se montrer. Ablanc. Il ne faut pas s’imaginer que toutes les actions des Princes soient méditées, ni s’aviser d’y chercher un sens mystique & allégorique. Balz. Les Gymnosophistes ne laissoient pas mettre à table ceux de leurs Ecoliers qui n’avoient fait aucune action louable pendant le jour. Apul. De Roc. On peut dire que toutes les passions des hommes par lesquelles l’ame se porte à quelque chose, comme l’amour, ou l’ambition, sont de véritables actions, plutôt que des passions ; & qu’au contraire tous ces mouvemens par lesquels l’ame se trouve interrompue dans son action, sont de véritables passions, comme la tristesse. On dit, qu’un homme va rendre compte de ses actions à Dieu ; pour dire, qu’il va mourir.

Une belle action ne rend pas notre ombre plus grande. Ce proverbe rapporté par Rochefort signifie, qu’il ne faut point s’enorgueillir d’une belle action. C’est encore une espèce de proverbe que ce que dit le même Auteur : Toutes nos actions se prennent à deux ances ; les uns louent ce que les autres blâment.

On appelle action de graces, un témoignage de reconnoissance ; & un remerciment pour un bienfait reçu. Gratiarum actio. Rendre mille actions de graces. On le dit aussi de la prière qu’on fait après le repas.

Action, signifie quelquefois, Vertu, force d’agir. Virtus, vis. L’aimant perd son action, quand on le laisse long-temps sans être armé.

Action, se dit aussi de ces effets momentanées qui consomment toute la force d’agir de quelque chose. Ce petard a


fait son action ou son effort en l’air. Une mine éventée n’a plus d’action.

Action. Ce nom se donne quelquefois au Canon de la Messe. Voyez CANON.

Action, se dit aussi d’un discours public, comme est un Sermon, une Harangue, un Plaidoyer, Oratio. Ce Prédicateur, cet Avocat, a fait une fort belle action. Acad. Fr.

En parlant de quelques anciens Conciles, on appelle action, ce que, dans les derniers, on a appellé session. Ainsi quand on parle des Conciles d’Ephèse, ou de Constantinople, on dit, dans la première action du Concile il fut délibéré, &c.

Action, se dit encore pour signifier quelque fait remarquable, sur-tout en matière de guerre. Praeclarus facinum. Ce Capitaine, ce Soldat, a fait une action brillante, une action de vigueur & d’éclat. La retraite de ce Général est une action aussi glorieuse qu’une victoire. Les armées sont si proches, que la campagne ne finira point sans quelque action.

Action, se dit aussi en Peinture, de la posture & de la disposition du corps, ou du visage, quand ils marquent quelque passion de l’ame. Habitus, status. Il étoit à genoux en action de suppliant. Il a peint Jupiter avec une action menaçante.

Au manège, on remarque l’action de bouche du cheval, qui lui fait mâcher son mors, & jetter beaucoup d’écume : ce qui témoigne beaucoup de vigueur & de feu. Ce cheval est toujours en action.

Action, en termes de Jurisprudence, est un droit qu’on a de poursuivre quelque demande, ou prétention en Justice. Jus. Il lui a cédé une action sur un tel ; il l’a subrogé en ses droits, noms, raisons & actions.

On appelle en Hollande Action, une obligation sur les deux Compagnies des Indes d’Orient, ou d’Occident. On nomme Actionnistes, ou Actionnaires, les propriétaires de ces sortes d’actions. Les Actions de la Compagnie des Indes sont montées à tant, sont diminuées de tant, sont à six pour cent.

Action, signifie aussi quelquefois, Effets mobiliaires. Les créanciers d’un tel Marchand se sont saisis de toutes ses actions ; pour dire, qu’ils se sont saisis de toutes ses dettes actives.

☞ Les actions Françoises sont présentement de trois sortes ; sçavoir, des Actions simples, des Actions rentiéres, & des Actions intéressées.

☞ Les Actions simples, sont celles qui ont part à tous les profits de la Compagnie, mais qui en doivent aussi supporter toutes les pertes, n’ayant d’autre caution que le seul fonds de la Compagnie même.

☞ Les Actions rentiéres, sont celles qui ont un profit sûr de deux pour cent, dont Sa Majesté s’est rendue garante, ainsi qu’elle l’étoit autrefois des rentes sur la Ville ; mais qui n’ont point de part aux répartitions ou dividendes.

☞ Les Actions intéressées tiennent, pour ainsi dire, le milieu entre les deux ; elles ont deux pour cent de revenu fixe avec la garantie du Roi, comme les actions rentiéres ; & outre cela elles doivent partager l’excédent du divident avec les Actions simples. Ces derniéres Actions ont été créées en faveur des Communautés Ecclésiastiques qui pouvoient avoir des remplacemens de deniers à faire.

☞ On dit, Nourrir une Action. C’est payer exactement, à leur échéance, les diverses sommes pour lesquelles on a fait sa soûmission à la Caisse de la Compagnie, suivant qu’il a été réglé par les Arrêts du Conseil, donnés pour la création des nouvelles Actions.

Une Action nourrie, est celle dont tous les payemens sont faits, & qui est en état d’avoir part aux Dividendes ou Répartitions des profits de la Compagnie. Jusqu’à cet entier & parfait payement, ce n’est pas proprement une Action, mais simplement une soûmission. Voyez SOUMISSION.

Fondre des Actions. C’est les vendre & s’en défaire, suivant les besoins que l’on a de fonds, soit pour nourrir d’autres Actions, soit pour ses autres affaires.

Action, signifie encore une part ou un intérêt que l’on a dans quelque société de commerce, ou dans quelque entreprise, pour en partager les profits ou les pertes. Telles sont les actions de la Compagnie des Indes, les actions du Canal de Pi-


Tome I. N cardie,