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RAOUL.

Dieu vous garde, mon fils !Mon père, Dieu vous garde !

LE PRIEUR, à part, en sortant.

Oui, dors, toi que le Ciel a remis à ma garde,
Toi qui, sans le savoir, ne souffres que par moi,
Dors ! je vais prier Dieu pour qu’il veille sur toi.


Scène II

RAOUL, toujours assis.

Dormir ! Ah ! lorsque l’âme est toujours obsédée
D’un même souvenir et d’une même idée,
Le corps peut-il trouver un instant de sommeil ?

Moment de réflexion profonde.
Quel étrange destin peut être au mien pareil ?

Moi, qui pour horizon n’ai plus que la montagne,
Je naquis sur les bords de la mer, en Bretagne,
Et de la vie, à peine, eus-je touché le seuil
Que sur mon front d’enfant vint se poser le deuil.
Le drame a commencé mon existence amère.
Mon père fut tué dans un duel ; et ma mère
Mourut bientôt après…… sans doute de douleur.
Par cette double mort, marqué pour le malheur,
Je quittai le château paternel, et des prêtres
Furent pendant longtemps mes hôtes et mes maîtres.
Séduit par leurs vertus, je me tournai vers Dieu.
Pour me donner à lui je faillis dire adieu