Page:Trolliet - La Route fraternelle, 1900.djvu/153

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LOUISE, se rapprochant de lui.

Parle donc, mon Raoul, et laisse encor ta voix
Arriver à mon cœur, tendre comme autrefois.
N’est-ce pas, mon amant, c’était une folie
De chercher à briser la chaîne qui nous lie,
Et nous-mêmes, luttant contre nous nuit et jour,
De vouloir surmonter l’insurmontable amour ?

RAOUL.

Non ! c’était un devoir.

LOUISE.

Non ! c’était un devoir.Le devoir est chimère
Lorsqu’on s’aime.

RAOUL.

Lorsqu’on s’aime.C’est vous l’épouse, vous la mère,
Qui me parlez ainsi ! Vous ne savez donc pas
Quel double et noble rôle est le vôtre ici bas !

LOUISE, d’une voix caressante.

Moi je ne sais plus rien, je t’aime !

RAOUL.

Moi je ne sais plus rien, je t’aime !Pauvre femme !
Quelques mois à ce point ont-ils changé votre âme ?
Est-ce vous, dont la voix m’ordonna de partir ?
Vous dont je vénérais le chaste cœur martyr ?
Est-ce vous, dont l’image, à la fois douce et sainte,
Visitait l’exilé dans cette sombre enceinte,
En lui montrant du doigt le paradis ouvert ?