Page:Trollope - La Pupille.djvu/73

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

d’une fille semblable à un garçon, ou d’un garçon semblable à une fille. »

Sir Charles lui lança un tel regard méprisant, que l’élégant M. Spencer lui tourna le dos et recommença à jouer.

Algernon avait rejoint sa sœur, et tous deux promptement équipés marchaient vivement vers la cascade.

« J’aimerais à te voir devenir l’ami du voisin de notre oncle Thorpe, mon cher Algernon ; je n’ai jamais vu un homme plus aimable.

— Comment se nomme-t-il ? demanda Algernon

— Sir Charles Temple. Je ne sais si je fais mal, mais je le trouve cent fois préférable à tous nos parents ici réunis.

— J’espère que ce n’est pas un crime de le préférer à nos parents, Flora, car dans ce cas je serais le plus grand criminel qui fût sur terre. Je les hais tous, et miss Sophie par-dessus tout ; et, comme il serait bien inutile qu’une branche de cette abominable famille fût aimable et bonne, je crois que nous sommes tous deux aussi détestables que nos cousins et nos cousines.

— Si cela est, il faut le supporter. Algernon, laissons-les tous de côté ; mais quant à sir Charles, parle-lui, tu n’as jamais vu un homme aussi charmant ; et puis il lit si bien à haute voix ! Ah ! que c’est beau, Algernon, de pouvoir faire revivre ainsi les héros des poètes ! Ah ! j’aime mieux entendre lire ainsi que chanter le mieux du monde.

— Eh bien ! moi, je préfère t’entendre chanter, et n’aime lire que pour moi.

— Enfin chacun son goût. Mais où donc peut être cette cataracte ? Je ne vois rien qui l’annonce, et nous sommes déjà bien loin. Mais quel est ce bruit étrange ? Allons de ce côté, Algernon. Ce doit être ce que nous cherchons. »