Page:Trollope - La Pupille.djvu/75

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conversation devint à peu près générale. On parla peu de la promenade en voiture ; mais Sophie, choisissant le moment où personne ne pouvait l’entendre, s’approcha de M. Thorpe et murmura en le regardant tendrement :

« Cette promenade m’a ravie, mon oncle ; quel bonheur pour moi, qui n’avais jamais éprouvé pareil plaisir !

— Chère petite fille ! la vie commence à peine pour vous, mais elle peut devenir très-heureuse, Sophie, » répondit le vieillard d’un ton sérieux.

La conversation n’était cependant pas fort animée. M. Wilkyns se taisait et buvait ; le major Heathcote se bornait à parler de temps en temps. M. Spencer demandait les moyens de se procurer un journal ; ses fils dévoraient. Algernon, assis tout contre sa mère, faisait des remarques mordantes sur tous et sur chacun, et Florence ne disait rien, jusqu’à ce que miss Wilkyns, après avoir fait faire le tour de la table à son verre, pour trinquer à l’anglaise, le lui tendit en disant à haute voix :

« Comment avez-vous disposé de votre après-midi, miss Heathcote ? Je ne vous ai plus retrouvée quand je suis descendue au salon.

— J’ai été à la cascade, répondit Florence en rougissant un peu.

— Y avez-vous été seule, ma chère enfant ? reprit l’impertinente Elfreda en regardant Florence et sir Charles simultanément.

— Oh ! non, pas seule ! J’avais quelqu’un avec moi.

— Vous aimez à vous promener dans les bois en tête-à-tête, ma chère ?

— Oui, répondit Florence.

— Et j’espère bien que c’était un jeune homme qui vous accompagnait ?