Page:Trollope - Le Domaine de Belton.djvu/87

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je suis étonné d’avoir pu ce jour-là même faire une demande en mariage. »

À quoi bon parler ainsi ? Clara avait bien eu aussi quelques légers remords de conscience à ce sujet, mais de telles pensées ne sont pas faites pour être exprimées au grand jour. Comme il s’était arrêté, elle fut obligée de parler :

« Notre excuse, c’est qu’elle l’aurait désiré.

— Sans doute elle l’aurait désiré, elle le désirait ; c’est pourquoi… » Il s’arrêta, il se sentait sur un terrain dangereux.

« C’est pourquoi vous vous êtes sacrifié. » Son cœur commençait à se serrer et elle ne pouvait retenir son sarcasme.

« Je ne veux pas dire que je me sois sacrifié, dit-il, car en ce qui me concerne rien ne pouvait être plus satisfaisant, comme je viens de vous le dire ; mais hier aurait dû être pour nous un jour solennel et…

— Je l’ai trouvé très-solennel.

— Je veux dire que mon excuse est d’avoir fait ce qu’elle m’a demandé.

— Ce qu’elle vous a demandé, Fred ?

— Ce que j’avais promis, je veux dire.

— Ce que vous aviez promis ? Je ne savais pas cela. »

Ces derniers mots furent prononcés très-bas, mais le capitaine Aylmer les entendit distinctement.