Page:Trollope - Les Bertram, volume 2.djvu/80

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Mais Adela ne pouvait permettre que les choses en restassent là. Elle se reprochait d’avoir été dure et injuste à l’égard de Bertram. Elle n’ignorait pas que c’était Caroline qui avait eu les plus grands torts, et pourtant elle s’était laissée aller à parler à George comme s’il eût été le seul coupable. Elle s’était sentie profondément émue à la vue de sa douleur. Quand il lui avait dit combien il était cruellement puni, elle aurait voulu lui prouver sa sympathie par ses larmes. Leurs peines n’étaient-elles pas jusqu’à un certain point semblables ?

Elle résolut donc de le revoir avant de partir pour lui dire qu’elle ne le blâmait pas et qu’elle savait que les plus grands torts n’étaient pas de son côté. Cette assurance, par elle-même, ne suffirait pas pour le consoler, mais elle se promettait de la lui donner de telle façon qu’il en pourrait tirer quelque consolation.

— Avant de partir, il faut que je vous voie seul un moment, lui dit-elle le même soir dans le salon. Je partirai de très-grand matin jeudi ; quand pourrai-je vous voir ? Vous n’êtes pas très-matinal, je le sais.

— Je le serai demain. Voyez-vous quelque inconvénient à faire une promenade avec moi avant déjeuner ?

— Pas le moindre, répondit-elle.

Et le rendez-vous se trouva ainsi fixé.

— Je suis sûre que vous allez me trouver bien sotte de vous déranger ainsi et de faire tant d’embarras pour rien, commença-t-elle d’un air un peu confus, quand ils se trouvèrent ensemble le lendemain matin.

— On ne trouve jamais que l’embarras est pour rien