Page:Trollope - Les Bertram, volume 2.djvu/81

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quand l’embarras est fait pour soi, répondit Bertram en riant.

— Je suis peut-être bien absurde, mais, voyez-vous, je sens que j’ai été injuste envers vous l’autre jour, et je ne veux pas vous quitter sans vous le confesser.

— Injuste, Adela ! et comment donc ?

— J’ai dit que vous aviez repoussé Caroline.

— Il est certain que je n’ai pas fait cela.

— Elle m’a écrit, et elle m’a tout raconté. Je suis sûre que sa lettre était sincère et elle ne contenait pas un mot, pas un seul mot de reproche pour vous.

— Ah ! pas un mot… oui, je le pensais ; je savais qu’elle ne se plaindrait pas de moi. Et rappelez-vous bien ceci, Adela : je ne lui reproche rien, moi non plus. Dites-lui cela, — pas comme venant de moi, mais comme venant de vous ; dites-lui que je ne lui reproche rien. Je ne dis qu’une seule chose, c’est qu’elle me m’aimait pas.

— Oh ! monsieur Bertram…

— C’est là tout, et cela est vrai. Adela, je ne possède pas grand’chose, mais je donnerais tout, tout ce que j’ai au monde pour retrouver Caroline telle que je la croyais autrefois. Mais si aujourd’hui, rien qu’en levant la main, je pouvais la ravoir, telle que je la connais maintenant, je ne le ferais pas. Mais ce n’est pas sa faute ; elle a essayé de m’aimer, et elle ne l’a pas pu.

— Je suis certaine qu’elle vous aimait.

— Jamais ! s’écria-t-il d’une voix retentissante, en se plaçant devant Adela de façon presque à lui barrer