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veloppent. L’églantine existait dans les haies de la Gaule avant d’y avoir reçu un nom latin ; l’histoire d’Ourashima se racontait au Japon bien avant que les lettrés du pays l’eussent alourdie de parures étrangères. On la trouve d’abord esquissée dans ce court passage du Nihonghi (Chronique du Japon), qui l’attribue à l’an 478 de notre ère : « Automne, septième mois. — Un homme de Tsoutsoukaha, district de Yosa, province de Tamba, fils d’Ourashima de Midzounoyé, alla pêcher en bateau. À la fin, il prit une grosse tortue, qui se changea en une femme. Sur quoi, le fils d’Ourashima, devenu amoureux, fit d’elle son épouse. Ils descendirent ensemble dans la mer et ils atteignirent le Mont Hôraï, où ils virent les génies. » Le dernier trait est emprunté au merveilleux du continent ; car au moment où parut le Nihonghi (720 après Jésus-Christ), tout était à la mode chinoise. Si l’auteur du Kojiki, publié seulement huit ans plus tôt (712), avait rédigé ce passage, il n’eût pas manqué d’écrire que, « traversant la plaine des mers, ils arrivèrent au Toko-yo no Kouni », la Terre Éternelle de l’ancienne mythologie. L’évocation du Mont Hôraï, cette île fortunée que les Chinois situaient dans la mer Orientale, n’est là que pour achever la phrase par un brillant souvenir classique. Mais qu’on efface cette touche de fard étranger : on aura la pure version japonaise.

Cette version, si sobre et si sèche dans le naïf exposé du Nihonghi, va recevoir une forme autrement relevée