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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/127

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difficile lorsqu’on se contente dans cette recherche d’une exactitude morale, rien ne serait plus simple que de répartir entre elles, à proportion de cette population, le nombre d’hommes demandé à toute la province. Si les communautés étaient trop petites pour qu’on ne pût pas leur demander un homme sans excéder leur proportion, l’on en réunirait plusieurs ensemble qui ne formeraient pour la milice qu’une seule communauté, et cette réunion serait constante comme la charge qui l’aurait occasionnée. Mais la variation dans le nombre des hommes dérange toute proportion. Si la seconde armée le roi ne demande que la moitié de ce qu’il a demandé la première, que fera-t-on relativement aux communautés qui n’avaient qu’un homme à fournir ? Que fera-t-on, si ces communautés sont en grand nombre ? Formera-t-on de nouvelles réunions, et changera-t-on chaque année l’association des communautés, suivant que la levée sera plus ou moins nombreuse ? ou bien laissera-t-on une partie des paroisses sans leur rien demander, en se réservant de revenir à elles l’année suivante, et de laisser alors reposer celles qui auraient fourni pour la levée actuelle ? Les deux partis ont des inconvénients presque égaux, et tous les deux sont mauvais. Le dernier, qui consiste à faire alternativement la levée dans les communautés différentes, offre des difficultés fâcheuses, si à la troisième année la proportion devient ou plus forte ou plus faible. Si elle devient plus forte, il faut donc encore demander des hommes à ces communautés, qui avaient seules fourni la seconde année ; elles supporteront une charge double. Si elle est plus faible, vous ne pouvez demander des hommes qu’à une partie des communautés laissées en réserve. Il vous en restera quelques-uns pour la quatrième année ; et si, comme il y a toute apparence, cette réserve ne répond pas au nombre d’hommes qui sera demandé, vous vous trouverez jeté dans de nouveaux embarras.

En un mot, n’étant pas possible de prévoir chaque année la demande de l’année suivante, et ces demandes variant nécessairement d’une année à l’autre dans toutes sortes de proportions, il est absolument impraticable de distribuer les communautés en plusieurs échelles, dont chacune soit chargée de fournir seule à la levée d’une année. Ces échelles, si on avait voulu une fois les former, empiéteraient continuellement les unes sur les autres, et la confusion qui en résulterait entraînerait dans mille injustices, et re-