en dix ans plus d’ouvrage qu’on n’en avait fait pendant trente-cinq ans de travaux de corvée[1].
Suite des observations du garde des sceaux. — Il paraît que l’imposition même la plus modérée sur les propriétaires égalera dans quelques généralités la moitié, dans d’autres le tiers ou le quart des vingtièmes, et qu’elle ne sera nulle part moindre du cinquième. Cette surcharge, ajoutée à la taille, aux vingtièmes, à la capitation, à la contribution pour le sel et pour les maréchaussées, aux droits d’aides, enfin à l’imposition que l’on paye déjà pour les ponts et chaussées, serait un surcroît considérable pour les propriétaires, auxquels on ne tient compte d’aucune amodiation sur les vingtièmes pour les réparations de leurs bâtiments.
On ne peut se dissimuler que les propriétaires supportent seuls l’imposition du vingtième, qui est proprement territoriale, et qu’ils supportent la plus grande partie des autres impositions, soit par ce qu’ils payent personnellement, soit par ce qu’ils perdent sur les fermages de leurs terres, que le fermier, comme je l’ai dit, afferme moins cher, à raison des subsides qu’il paye lui-même.
Réponse de Turgot. — On sait que l’imposition des vingtièmes est au-dessous du véritable vingtième des revenus : on sait d’ailleurs qu’elle est très-mal répartie ; c’est surtout à l’imperfection de cette répartition qu’il faut attribuer la différente proportion entre les vingtièmes et l’imposition proposée, pour les différentes généralités, pour le remplacement des corvées. La corvée est aussi une surcharge ajoutée aux impositions dont on fait ici l’énumération. La différence sera, 1o que cette surcharge sera beaucoup moindre ; 2o qu’elle sera répartie sur tous les propriétaires, au lieu que la corvée n’était supportée que par une partie du peuple, et par la partie la plus chargée de toutes ces impositions dont M. le garde des sceaux parle, et dont une grande portion ne tombe point sur les privilégiés. Le fardeau total sera moindre, et l’on en fera porter une partie à ceux des sujets du roi qui n’y contribuaient pas, et qui d’ailleurs sont plus soulagés que les autres.
J’ai répondu surabondamment plus haut (page 257 et suivantes.) à toutes ces observations sur la surcharge des propriétaires.
Suite des observations du garde des sceaux. — L’on convient, dans le préambule, que l’on ne peut se flatter de faire à la fois tous les chemins, même avec le secours de la corvée de bras et de chevaux.
Réponse de Turgot. — On ne convient pas, mais on prouve, con-
- ↑ Avec une imposition annuelle qui ne dépassa jamais la somme de 500,000 livres, Turgot avait construit et entretenu cent soixante lieues de grandes routes dans la généralité de Limoges. (E. D.)