d’intrigues secrètes ; mais le roi était assez puissant pour que la crainte ou l’espérance engageassent ordinairement quelque complice à trahir un tel secret.
Souvent une ambition peu raisonnée poussa les premiers conquérants à s’étendre au loin, et dans l’impossibilité, faute de troupes, ou par leur trop grande distance, de conserver leurs conquêtes, ils se contentèrent d’imposer des tributs qu’on ne payait que tant qu’on était le plus faible.
De là des guerres perpétuellement renaissantes, et une variété continuelle de succès, de pertes, de nations dominantes successivement, suivant que le hasard leur donnait des rois conquérants.
Les États des princes qui régnaient sur des peuples laboureurs et policés jusqu’à un certain point, ont dû se trouver, par l’inégalité des progrès de leurs voisins, entourés de peuples barbares. Quand ils étaient dans leur vigueur, ils se sont étendus en faisant des conquêtes, en portant des colonies chez ceux-ci, en les poliçant peu à peu ; quand ces mêmes États sont retombés dans la faiblesse, les barbares les ont attaqués à leur tour avec avantage ; l’envie de dominer sur un pays riche piqua l’ambition des chefs et l’avarice d’un peuple féroce.
Ces torrents, ces migrations des peuples qui parmi les barbares se succèdent sans laisser de traces, ont quelquefois embrassé dans leur cours des peuples déjà policés, et ce n’est que de cette manière que la mémoire a pu en venir jusqu’à nous. Alors le peuple barbare adopta la police du vaincu, par l’influence que les lumières et la raison sont toujours sûres de prendre sur la force, quand la conquête n’a pas été l’extermination. — Les barbares, devenus policés, poliçaient leur premier séjour. Les deux peuples n’en formaient qu’un : c’était un empire plus étendu sous un seul chef.
Les peuples policés, plus riches, plus tranquilles, plus accoutumés à une vie molle, au moins sédentaire, surtout dans les pays fertiles qui furent les premiers cultivés, perdent bientôt la vigueur qui les a rendus conquérants, quand une discipline savante n’oppose point une barrière à la mollesse. — Les conquérants alors font place à de nouveaux barbares, les empires s’étendent, ils ont leur âge de vigueur et leur décadence ; mais leur chute même aide à perfectionner les arts et améliore les lois. — Ainsi se succédèrent les Chaldéens, les Assyriens, les Mèdes, les Perses, et la domination de ceux-ci fut la plus vaste.
Voilà comme le royaume de Lydie, ayant acquis quelque supériorité, engloutit tous les petits royaumes de l’Asie Mineure adoucis par les mœurs grecques ; puis, semblable à ces fleuves qui, enrichis du tribut de mille autres, vont se perdre dans la mer, fut à son tour envahi par Cyrus, apparaissant avec une nation nouvelle. Cette nation, d’abord barbare, ne conserva sous les successeurs du conquérant que l’orgueil et l’ambition. La mollesse des vaincus passa bientôt aux vainqueurs. La discipline, qui seule peut contrebalancer la force, et par laquelle la raison des peuples éclairés supplée à l’impétuosité des barbares, n’était connue que des Grecs. Toute la masse de la puissance des Perses vint échouer contre la Grèce, qui s’était formée et instruite dans les guerres intestines.
Son pays, coupé d’îles et de montagnes, ne pouvait être sujet aux mêmes vicissitudes. Il était difficile que dans les premiers temps il s’y formât de grands empires. Une foule de petits États, presque toujours en guerre, y conserva l’esprit militaire, et y augmenta l’habileté des manœuvres, la per-