jet. Là, ce ne sont que des conséquences de définitions abstraites qui renferment un si petit nombre d’idées, qu’il est facile de les embrasser toutes. Une chaîne de vérités, toutes dépendantes les unes des autres, se forme, chaîne où les hommes n’ont qu’à reconnaître tous les pas qu’ils ont faits pour accumuler vérités sur vérités. Ces vérités deviennent de plus en plus fécondes ; plus on avance dans la spéculation, plus on découvre de ces formules générales de calcul d’où l’on peut descendre à des vérités particulières en particularisant les hypothèses. Les vérités, en se combinant, se multiplient et se combinent encore ; d’où naît une nouvelle multiplication, parce que chacune devient la source d’une foule de vérités qui ne sont pas moins fécondes que les premières.
À mesure que le nombre de ces vérités connues augmente, à mesure qu’on a examiné les propriétés d’un plus grand nombre de figures, on a exprimé leurs propriétés communes par des formules et des principes généraux qui renfermaient tout ce qu’on connaissait. Ainsi, même dans les mathématiques, on commença par examiner quelques figures familières, un petit nombre de propriétés des lignes : les principes généraux sont l’ouvrage du temps.
De là, comme on a cru que l’ordre le plus beau était celui où d’un seul principe découlait une foule de conséquences, on a été obligé, pour le mettre dans les ouvrages de mathématiques, de refondre de siècle en siècle toute la manière d’enseigner. On n’a pas vu que cet ordre, prétendu naturel, est arbitraire ; qu’en géométrie, où l’on exprime les rapports généraux des figures, ces rapports sont réciproques ; qu’on peut également conclure le principe de la conséquence, ou la conséquence du principe : l’équation de l’ellipse peut être tirée de sa construction, comme sa construction de son équation.
S’il y a une méthode préférable, c’est donc celle de suivre les pas de l’esprit humain dans ses découvertes, de faire sentir les axiomes généraux qui naissent de toutes les vérités particulières, et en même temps de faire voir la manière dont elles lient entre elles toutes les vérités précédentes. — Ainsi l’image des progrès des mathématiques ressemble à l’Olympe des poètes, dont la pointe était tournée vers la terre, et qui, à mesure qu’il s’éloignait de la terre, s’élargissait jusqu’à ce qu’il rencontrât le ciel. Ainsi la géométrie s’est étendue jusqu’à l’infini. Les vérités particulières mènent à des formules de plus en plus générales ; et, même dans les mathématiques, c’est du particulier au général qu’il faut avancer.
Mais, quand les principes généraux sont trouvés, quelle rapidité ne donnent-ils point aux progrès de ces sciences ! L’algèbre, la réduction des courbes en équation, l’analyse de l’infini ! C’est une suite de vérités hypothétiques, certaines par là même, et en même temps vérifiées par la nature, parce que les premières hypothèses n’étaient point arbitraires, mais fondées sur les idées d’étendue que nous donnent nos sens, et qu’ils ne nous donnent que parce qu’il y a réellement des êtres étendus dans la nature.
Les mathématiques partent d’un petit nombre d’idées, et en combinent à l’infini les rapports : c’est tout le contraire dans les sciences physiques, où il s’agit, non d’une suite d’idées et de rapports, mais de faits et d’idées qui ont un objet existant passé ou présent (le futur ne peut être que mathématique), et dont la vérité consiste dans la conformité de nos opinions avec cet objet.
Sous le nom de sciences physiques, je comprends la logique, qui est la con-